Harpe de verre
Tourner avec son doigt sur le bord d’un verre à la fin d’un repas et en tirer quelques sons est déjà amusant… Choisir des verres qui sonnent juste et bien, construire un instrument avec tous ces verres et apprendre à jouer Mozart, Bach, ou la musique d’Harry Potter… cela devient magique!
Pureté, transparence, résonance… justesse, toucher, caresse… les doigts dansent d’un verre à l’autre, et tournent, virevoltent… telle une ballerine qui touche si légèrement le sol que nous oublions que la pesanteur existe, et nous voilà partis dans un autre monde…
C’est en décembre 2005 que je me suis construit ma première harpe de verre. Elle comportait 9 verres à vin et à cognac qui me permettaient de jouer la plupart des airs de Noël à 2 voix. Fort de mes premiers succès, je me suis ensuite fabriqué un instrument avec 32 verres tous parfaitement justes sauf 4 (que j’ accorde avec de l’eau).
J’apprécie l’aspect virtuose de passer très rapidement d’un verre à l’autre, la sensation d’ harmonie en jouant jusqu’à 6 verres à la fois, néanmoins j’éprouve aussi un plaisir intense à caresser du doigt chaque verre séparément afin d’en moduler à ma guise la sonorité, la couleur… comme si ce doigt était mon archet sur les cordes de mon violon ou sur la lame de ma scie musicale.
Je vous propose un concept de concert intimiste, au cours duquel je joue à vos invités de mes arrangements musicaux variés, agrémenté d’images projetées sur écran, d’anecdotes et explications. Ce type de « Concert dans votre Salon » est parfait pour animer vos événements, vos réceptions, et bien sûr pour accompagner des activités ayant l’eau pour thème !
Deux de mes apparitions remarquées sont ma participation au film Radiostars, du réalisateur Romain Levy, et mon passage à l’émission « Comment ça va bien ! » avec Stephane Bern
La harpe de verre a travers l'histoire...
Dès le moyen-âge on trouve des croquis de récipients en verre ou porcelaine frappés pour produire des sons musicaux, notamment en Chine et en Perse. En Europe, les premières traces de musique sur verres datent de 1492. Il faut cependant attendre 1743 pour voir apparaître l’idée de frotter le bord des verres: c’est à l’irlandais Richard Puckeridge qu’elle est attribuée. Il était ainsi à faire des verres un véritable instrument de musique qu’il appelle « orgue angélique » (« angelick organ ») . Trois ans plus tard, le célèbre compositeur allemand Gluck annonce lui aussi qu’il va jouer en concert à Londres du verrillon (un instruments constitué de verres à vin placés verticalement sur une table ou une caisse de bois). Et en 1761, Ann Ford, une virtuose de l’instrument proche de Puckeridge, fait publier le manuel Instructions for the Playing the Musical Glasses…
Harpe de verre (glass harp en anglais et glasharfe en allemand) est le nom donné au 20ème siècle par Bruno Hoffmann, musicien de Stuttgard (1913-1991), à l’ancien glasspiele ou verrillon. La harpe de verre n’a donc pas de cordes en verre (!), mais Hoffmann lui a trouvé une certaine ressemblance sonore avec la harpe éolienne, instrument de musique à cordes « jouées » par le vent.
La harpe de verre sera reléguée au rang de curiosité, voire d’instrument de foire pendant la période de gloire d’un autre instrument de verre inspiré de celui-ci: le glassharmonica. Néanmoins Bruno Hoffmann consacra sa vie aux instruments de verre, à redécouvrir et perfectionner la harpe de verre, à rechercher, jouer et enregistrer le répertoire prévu originalement pour le glassharmonica. Il adopta une disposition chromatique des verres de bas en haut permettant de jouer jusqu’à des accords de 6 sons. La joueuse allemande vivant en Suisse, Ingeborg Emge, joue aujourd’hui sur un des instruments de Bruno Hoffmann fabriqué avec 50 verres soufflés spécialement, et s’attache à perpétuer sa tradition musicale. Il existe très peu de musiciens professionnels en Europe occidentale. Internet aidant, on s’aperçoit qu’ils existent foison de joueurs talentueux de harpe de verre dans les pays de l’est.
Comment ça fonctionne ?
Le fonctionnement des verres musicaux est assez semblable à celui des instruments à cordes: l’archet enduit de collophane accroche les cordes en boyau ou en métal et les fait vibrer, tandis que pour les verres, des doigts humides bien dégraissés sont frottés sur le bord d’un verre, permettant ainsi la mise en vibration d’une partie de la matière et donc de produire un son. La hauteur de ce son varie en fonction de la grandeur du verre et de son épaisseur. Elle peut être éventuellement modifiée en y ajoutant ou retirant de l’eau.
La puissance sonore émise est influencée par la pression exercée par les doigts sur le verre et par leur vitesse de rotation. La couleur du son dépend elle de l’épaisseur, de la composition du verre, et bien sûr du toucher du maître!
En pratique l’idéal est de disposer d’un maximum de verres qui sonnent justes car l’accordage par ajout d’eau, certes assez amusant lorsqu’il est réalisé en présence du public, est assez fastidieux et permet de descendre le son sans le monter. Il faut aussi trouver une manière de disposer les verres qui convient à chacun en lui permettant de jouer les accords les plus complets possibles. Pour éviter la casse et permettre un bon confort de jeu, il est utile de les fixer fermement avec crochets, élastiques, aimants, divers systèmes D. Enfin, afin de pouvoir promener les doigts rapidement d’un verre à l’autre sans en accrocher au passage il est nécessaire d’ avoir tous les bords supérieurs des verres à la même hauteur…
Plus qu’à écrire ses arrangements et à travailler! Bon courage pour ceux qui ont le désir de s’y mettre: c’est un vrai boulot…
Je vous invite à revenir bientôt sur cette page: vous pourrez alors voir la vidéo (en cours actuellement de réalisation) « Comment fabriquer sa première harpe de verre » !
Et le glassharmonica ?
Le glassharmonica a été conçu en 1762 par Benjamin Franklin, homme d’état et inventeur américain. Lorsqu’il entend en 1757, toujours à Londres, le son de l’orgue angélique, il est tellement enthousiasmé qu’ il décide de perfectionner l’nstrument afin d’en rendre le jeu plus aisé. Il fait souffler des verres en forme de coupes qui sont emboîtées horizontalement sur un essieu, lequel est mis en rotation par une courroie actionnée par une pédale. Les coupes sont disposées chromatiquement et dépassent l’une de l’autre de façon à ce que le bord de la coupe plus grave dépasse de la suivante plus aigüe d’un doigt. Le jeu ressemble alors à celui d’un clavier et permet de jouer des accords complexes. L’instrument est baptisé armonica (sans “h”) par Franklin en hommage à l’harmonie de la langue italienne. L’armonica de verre est néanmoins couramment appelé “glassharmonica”.
Le glassharmonica inventé par Franklin sera plus populaire que la harpe de verre et très en vogue de 1760 à 1830. 5000 instruments auraient été construits et on répertorie aujourd’hui 400 oeuvres d’époque composées pour le glassharmonica, notamment par C.P.E. Bach, G.Donizetti, L. van Beethoven… C’est la virtuose Marianne Davies qui fait connaître cet instrument en Allemagne, notamment en 1773 auprès de Léopold et Wolfgang Amadeus Mozart. Wolgang a composé en 1791 pour une autre grande joueuse (aveugle), Mariane Kirchgessner, sa dernière oeuvre de musique de chambre: le Quintette pour armonica, flûte, hautbois, alto et violoncelle. Il connaissant néanmoins déjà auparavant l’instrument dont l’oeuvre la plus connue est composée bien plus tôt: l’Adagio pour glassharmonica solo.
Après 1830, le glassharmonica disparait: le manque de puissance sonore, la difficulté de transport, mais aussi la réputation sans doute anecdotique que l’instrument provoquait divers troubles tels des évanouissements, des fausses couches, des convulsions d’animaux…. Il faut dire qu’un médecin viennois, le Dr Franz Anton Mesmer, l’a utilisé dans des expériences pas très bien vues sur l’hypnose et ses adversaires ont combattu non seulement ses théories mais l’instrument qu’il utilisait avec ses patients. Une autre raison est d’ordre médical: le verre de l’époque contenait une grande quantité de plomb qui, par les doigts mouillés, pénétrait dans le corps et provoquait le saturnisme. Certains inventeurs essayent alors d’utiliser des commandes par un clavier pour éviter de toucher le verre avec les doigts mais sans grande réussite car cela n’augmentait pas le volume sonore et faisait perdre tous les avantages non mécaniques liés à la production du son directement par les doigts. G.Donnizetti l’utilise encore en 1835 dans la “scène de la folie” de Lucia du Lammermoor mais la partie d’armonica de verre fut remplacée ultérieurement par les flûtes.
Après des dizaines d’années passées dans l’ombre, le glassharmonica renait une première fois en 1919 grâce à Richard Strauss, friand de sonorité spéciale, qui l’utilise dans son opéra “La Femme sans ombre”. Ensuite, seulement en 1983, on doit à Gerhard Finkenbeiner, maître verrier d’origine allemande installé près de Boston, la fabrication d’instruments modernes en quartz, et à des joueurs comme Thomas Bloch son utilisation en concerts.
Glassharmonica vs Harpe de verre !
Que choisir? La harpe de verre ou le glassharmonica?
Le glassharmonica permet davantage de virtuosité; on peut aussi y jouer jusqu’à 10 notes ensemble (contre 6 à la harpe de verre). Par contre, les verres musicaux permettent des attaques plus sûres et précises ainsi que des nuances plus riches que le glassharmonica, car on en contrôle la vitesse de rotation directement avec les doigts.
Un autre avantage de la harpe de verres, c’est qu’avec patience et de nombreuses heures de recherche, on peut trouver les verres qui sonnent bien et juste et se la construire soi-même à peu de frais, ce qui n’est pas le cas du glassharmonica.
C’est aussi à la mode en ce début de 21ème siècle de construire des « home made instruments« , et dans l’ère du temps de récupérer des objets pour leur donner une 2ème vie.
Si l’idéal est de faire souffler des verres expressément pour son instrument afin d’obtenir une homogénéité sonore contrôlée et des dimensions de verres régulières, de nombreux spectateurs me disent néanmoins que là est l’originalité supplémentaire de ma harpe de verre: savoir que ces sons si divins sont émis par de « vulgaires verres » !
Voici une vidéo dans laquelle j’interprète la célèbre Berceuse « Wiegenleid » de Johannes Brahms, accompagné de mon piano: